Lutrybeach/Ph Rene Mouna |
Je vous dirais que je viens d´Ossobé, ce
pays situé au cœur de l´Afrique sur les sables chauds et brûlants du
Sahara et à la lisière de la forêt équatoriale. C´est dans cette
contrée enclavée que je vis le jour, une nuit de pleine lune le soir d´une récolte dans un champs de manioc. Mon
pays a connu des guerres, des rébellions, des conflits ethniques et une
dictature sous laquelle je suis née. D´ailleurs c´est la raison pour
laquelle je suis né au village, je n´ai pas eu un berceau comme les
autres enfants de mon âge.
Ma famille regagna la capitale où mon
père s´y trouvait dans les années 1986. Je fuis envoyée à la maternelle
un an après. En 1990, j´avais huit ans quand le vent de la démocratie
souffla sur le pays : fini les demi-salaires, l´effort de guerre, les
salaires de papa et maman seraient désormais versés totalement. C´était
sans compter les retards dans le versement, les grèves et
l´enrichissement illicite des nouveaux parvenus et autres maîtres de la
ville. Surviennent les mécontentements dus à l´inégalité et l´injustice
sociale.
C´est dans ce climat que je fis mon
cursus primaire, secondaire, universitaire et signais mon premier
contrat de journaliste, sous le règne du démocrate. Et ce règne continu
encore 23 ans aujourd´hui. Du desk
politique au desk environnement dont je pilotais, j´ai dû écouter le discours de beaucoup
de personnalités politiques dont un certain sénateur de l´Illinois de
retour du Darfour un après-midi d´Avril 2006. Il s´appelle Barack Obama.
Il revenait du Darfour, il était ému et promettait une solution à la
crise darfourie. Depuis il est à son deuxième mandat présidentiel et le
Darfour est toujours en crise.
Il faut avouer que 2006 était mon année.
J´ai couvert le sommet de la CEMAC à N´Djaména : j´ai pu voir les
extravagances du Roi des rois d´Afrique (paix à son âme), expérimenter
la générosité du guide Mouammar et la virulence du révolutionnaire
Kadhafi qu´il a été. Jamais un homme n´a été ainsi contrarié et contesté
sous le soleil.
Puis un jour je suis parti. J´ai déposé
ma démission, j´ai vidé mes casiers et tiroirs, j´ai quitté le journal
le cœur serré. Mais au fond contente d´une nouvelle vie qui s´ouvrait à
moi. Je suis parti avec une assurance que je reviendrai de sitôt. Je me
suis retrouvé de l´autre côté de la mer. Mon voyage d´un an s´est mué
en deux, puis trois, puis quatre ans. Et me voici outre-manche. Dans ces
pays où les hivers sont blancs gris, sombres. Ces pays où, le chante
des oiseaux annonce le printemps qui, amène avec lui la vie, la nature
verdoyante avec ses mille bourgeons de fleurs, l´odeur flâneuse de la
terre humide qui se mêle à celles des tulipes, des lilas et des roses.
J´ai grandi dans un pays où, j’ai eu la chance de voir tous les
jours des frères Dalton en réels. Un vrai rodéo où, on braque les fourgons des payeurs en pleins jours, on
braque les individus qui viennent faire des retraits bancaires,
on gifle et crache sur les diplomates sans s’inquiéter. Même devant le
siège de leurs représentations. On tire à bout portant sur l’Homme, on
descend dans un commissariat se rendre justice soi-même car le sang doit
se laver dans le sang.J´ai appris à aimer cette méchanceté stupide, cette imbécillité qui
consiste à préparer minutieusement des attaques qui rapportaient
des butins de rien du tout. Je trouvais fascinant que des dirigeants du peuple soient si unis pour la
défense de très mauvaises causes. En fait, j’ai fini par comprendre que la
bêtise et la méchanceté mises ensemble donnent lieu à des gags très
drôles. Sauf quand l’Homme doit la vivre au quotidien. C´est mon histoire, ma vie. Je suis Betoudji, je suis en quête d´une patrie...
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire