Et si l´enfer sur terre a existé…
Quiconque ne se souvient point de
l´histoire est condamné à la revivre de nouveau. Je suis arrivée à Auschwitz
par un élan de curiosité, j´y repartirai par devoir de mémoire.
Les barbelés entourant le camp et un Mirrador, de là on tirait à bout portant sur les fuyards (Ph Rene Mouna)
Les trois camps avec leurs fils barbelés à haute voltage, leurs miradors et
les cheminées des fours crématoires, les blocs d´expériences médicales, … Tout
est là et témoigne de l´horreur que les déportés ont vécu. Dans mes souvenirs
d´enfance, la guerre mondiale se rattache aux anciens combattants et leurs
décorations alignées sur leurs tenues usagées. À ma tante et ses nombreuses
passages dans la capitale pour retirer la pension des anciens combattants, cette
compensation donnée aux veuves et orphelins des tirailleurs africains. Quand je
fus au lycée, j´appris alors l´histoire de la guerre sous le prisme français.
Je connaissais alors la version des alliés vainqueurs de la guerre. Depuis deux
ans et demi, je connais une autre version, la version allemande. Celle teintée
des interdits et des retenues avec son corollaire de mots étouffés, des attitudes à éviter. Une version saupoudrée de culpabilité et de
repentance. J´eus assez du politiquement correct. Il me fallait voir Auschwitz
pour me faire ma propre idée. Je partis!
Les images ont leur language (Ph Rene Mouna)
Mais c´est au sein du musée que la réalité insaisissable jusqu’à là saute à l´oeil. Derrière les vitres, un tas de chaussures ; là des peignes, des
boîtes à cirage, des lunettes
aux montures rouillées, un amoncellement de valises portant le nom et l’adresse de leurs propriétaires : Marta Kafka,
Vienne. Un monticule de cheveux de juifs rasés, destinés à une usine de textiles
pour la fabrication de tissus. Plus loin, de ballot d´étoffes, rêche dont le
temps y a laissé ses empreintes jaune-brun. Des habits de nourrissons. Voilà ce
qui ébranla mon cœur de femme. On se demande «quel est ce Dieu qui a pu laisser faire?»
les deux fours crématoires. Ici, 1000 personnes furent gazéifiées (Ph Rene Mouna)
Mais la goutte qui fit déborder ma vase c´était, la chambre à gaz. Devant moi,
les deux fours crématoires. Tel qu´ils étaient dans mon livre d´histoire de troisième. Sans
un trucage quelconque. Comment garder le silence imposé dans ce lieu en mémoire
des milles victimes gazéifiées? Immortaliser ce que je vis, le plaquer sous le
nez du premier de ces nationalistes qui tenterait encore le déni d´histoire en
criant à la manipulation contre son cher Allemagne. Tête baissée, je sortis en
silence de la chambre à gaz. Je n´ai plus de mot. Non, Auschwitz ne pourrait être
décrit. Aucun mot n´est assez fort, assez exact et, assez juste pour dépeindre
l´horreur dont on voit encore les traces. Je ne peux aujourd´hui que dire, si
l´enfer sur terre a existé, Auschwitz en serait le pandémonium.
C´est parti, bonne lecture!
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