mardi 11 juin 2013

Chercheur de patrie

Lutrybeach/Ph Rene Mouna



 Je vous dirais que je viens d´Ossobé, ce pays situé au cœur de l´Afrique sur les sables chauds et brûlants du Sahara et à la lisière de la forêt équatoriale. C´est dans cette  contrée enclavée que je vis le jour, une nuit de pleine lune le soir d´une récolte dans un champs de manioc. Mon pays a connu des guerres, des rébellions, des conflits ethniques et une dictature sous laquelle je suis née. D´ailleurs c´est la raison pour laquelle je suis né au village, je n´ai pas eu un berceau comme les autres enfants de mon âge.
Ma famille regagna la capitale où mon père s´y trouvait dans les années 1986. Je fuis envoyée à la maternelle un an après. En 1990, j´avais huit ans quand le vent de la démocratie souffla sur le pays : fini les demi-salaires, l´effort de guerre, les salaires de papa et maman seraient désormais versés totalement. C´était sans compter les retards dans le versement, les grèves et l´enrichissement illicite des nouveaux parvenus et autres maîtres de la ville. Surviennent les mécontentements dus à l´inégalité et l´injustice sociale.
C´est dans ce climat que je fis mon cursus primaire, secondaire, universitaire et signais mon premier contrat de journaliste, sous le règne du démocrate. Et ce règne continu encore 23 ans aujourd´hui. Du desk politique au desk environnement dont je pilotais, j´ai dû écouter le discours de beaucoup de personnalités politiques dont un certain sénateur de l´Illinois de retour du Darfour un après-midi d´Avril 2006. Il s´appelle Barack Obama. Il revenait du Darfour, il était ému et promettait une solution à la crise darfourie. Depuis il est à son deuxième mandat présidentiel et le Darfour est toujours en crise.
Il faut avouer que 2006 était mon année. J´ai couvert le sommet de la CEMAC à N´Djaména : j´ai pu voir les extravagances du Roi des rois d´Afrique (paix à son âme), expérimenter la générosité du guide Mouammar et la virulence du révolutionnaire Kadhafi qu´il a été. Jamais un homme n´a été ainsi contrarié et contesté sous le soleil.
Puis un jour je suis parti. J´ai déposé ma démission, j´ai vidé mes casiers et tiroirs, j´ai quitté le journal le cœur serré. Mais au fond contente d´une nouvelle vie qui s´ouvrait à moi. Je suis parti avec une assurance que je reviendrai de sitôt. Je me suis retrouvé de l´autre côté de la mer. Mon voyage d´un an s´est mué en deux, puis trois, puis quatre ans. Et me voici outre-manche. Dans ces pays où les hivers sont blancs gris, sombres. Ces pays où, le chante des oiseaux annonce le printemps qui, amène avec lui la vie, la nature verdoyante avec ses mille bourgeons de fleurs, l´odeur flâneuse de la terre humide qui se mêle à celles des tulipes, des lilas et des roses.

J´ai grandi dans un pays où, j’ai eu la chance de voir tous les jours des frères Dalton en réels. Un vrai rodéo où, on braque les fourgons des payeurs en pleins jours, on braque les individus qui viennent faire des retraits bancaires, on gifle et crache sur les diplomates sans s’inquiéter. Même devant le siège de leurs représentations. On tire à bout portant sur l’Homme, on descend dans un commissariat se rendre justice soi-même car le sang doit se laver dans le sang.J´ai appris à aimer cette méchanceté stupide, cette imbécillité qui consiste à préparer minutieusement des attaques qui rapportaient des butins de rien du tout. Je trouvais fascinant que des dirigeants du peuple soient si unis pour la défense de très mauvaises causes. En fait, j’ai fini par comprendre que la bêtise et la méchanceté mises ensemble donnent lieu à des gags très drôles. Sauf quand l’Homme doit la vivre au quotidien. C´est mon histoire, ma vie. Je suis Betoudji, je suis en quête d´une patrie...

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